Publiée depuis 1948, la revue International Social Security Review (ISSR) est la plus importante publication trimestrielle internationale en matière de sécurité sociale dans le monde.
Cet article examine les pratiques actuelles en matière de fourniture de protection sociale aux réfugiés et aux migrants, en se concentrant principalement sur les pays d’accueil à faible et moyen revenu. Il s’intéresse aux prestataires officiels de protection sociale, notamment les institutions publiques, les agences de développement et les organisations humanitaires. Ces dernières années ont vu une hausse du financement venant de donateurs multilatéraux, en particulier lors de la pandémie de COVID-19, permettant ainsi l’élaboration de programmes nationaux d’assistance dans les pays à faible et moyen revenu qui s’appliquent également aux réfugiés et, dans une moindre mesure, aux travailleurs migrants. Les organismes internationaux jouent un rôle essentiel dans la fourniture d’une assistance humanitaire en espèces aux réfugiés, compte tenu de leur statut de protection internationale, conformément à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et aux protocoles y afférents. L’accès à l’assurance sociale demeure lié à l’emploi formel. Les droits à l’assurance sociale sont souvent restreints pour les migrants, et les réfugiés sont généralement exclus de l’emploi formel dans les pays à faible et moyen revenu. En matière d’interventions sur le marché du travail, les réfugiés et les migrants sont régulièrement mis à l’écart des programmes nationaux, tandis que les permis de séjour des migrants sont souvent conditionnés au fait d’avoir un emploi. En ce qui concerne les réfugiés, les organismes internationaux jouent un rôle de premier plan dans la fourniture de programmes de subsistance visant à accroître les chances de générer des revenus, mais également l’inclusion économique et l’indépendance financière. Toutefois, ces interventions se révèlent d’une efficacité incertaine, faute de preuves rigoureuses, et sont souvent de court terme en raison de la couverture limitée.
La migration est un phénomène complexe qui revêt des implications considérables pour l’accès des travailleurs migrants à la protection sociale et pour les systèmes de sécurité sociale, à la fois dans les pays d’origine et d’accueil. Le nombre de migrants ne cessant d’augmenter à l’échelle mondiale, les responsables politiques sont confrontés à une multitude de défis dans l’adaptation des programmes de protection sociale afin de répondre aux besoins d’une population de plus en plus diverse. Cet article explore les liens entre la migration et la protection sociale, et met en lumière les enjeux et les tendances clés qui ont émergé ces dernières années. Il examine l’impact de la migration sur les systèmes de sécurité sociale dans les pays d’origine et d’accueil, mais se penche également sur les opportunités et les défis que les schémas migratoires peuvent créer pour ces systèmes. Il offre un aperçu des mesures de protection sociale et des lacunes dans certains pays, et considère la nécessité pour les décideurs politiques de prendre en compte les besoins et la situation spécifiques des populations migrantes. Par ailleurs, il aborde le rôle de la coopération internationale dans la réponse aux défis et aux opportunités inhérents à la migration en matière de protection sociale. Il s’intéresse à certaines tendances et innovations émergentes qui visent à promouvoir la gouvernance des régimes de protection sociale, lesquelles sont susceptibles d’aider à relever certains défis juridiques et pratiques auxquels sont confrontés les travailleurs migrants et les institutions de sécurité sociale. Cet article met en lumière la nécessité de comprendre la relation complexe entre la migration et la protection sociale afin d’élaborer des politiques et des programmes répondant aux besoins de tous les membres de la société, indépendamment de leur pays d’origine ou de leur statut de migrants. Il souligne également l’importance d’une administration de qualité et d’une bonne gouvernance dans la mise en œuvre efficace des mesures de protection sociale. À l’appui du programme relatif aux objectifs de développement durable à l’horizon 2030, un appel est lancé en faveur d’une collaboration et d’un dialogue continus entre les décideurs politiques et les parties prenantes afin de garantir l’équité, l’efficacité, l’inclusivité et la pérennité des systèmes de sécurité sociale dans un monde de plus en plus globalisé.
La Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant (CNUDE) énonce les droits de chaque enfant, à savoir le droit de bénéficier de la sécurité sociale et le droit à un niveau de vie suffisant pour permettre son développement physique, mental, spirituel, moral et social. La CNUDE est le traité relatif aux droits de l’homme le plus largement ratifié à ce jour. Toutefois, des millions d’enfants continuent d’être privés de leurs droits et subissent la pauvreté, la vulnérabilité et l’exclusion sociale simplement parce qu’ils sont déplacés – à l’intérieur de leur pays ou au-delà des frontières. Bien qu’étrangers aux causes de ces déplacements, les enfants en paient le plus lourd tribut. Cette réalité révèle qu’une large partie de la population est «laissée pour compte», mettant en péril les progrès accomplis pour atteindre les objectifs de développement durable des Nations Unies dans le cadre des efforts internationaux qui visent à éradiquer la pauvreté, et à faire en sorte que tous les êtres humains vivent dans la paix et la prospérité. Cet article plaide en faveur de systèmes inclusifs de protection sociale pour les enfants déplacés en mettant en évidence les difficultés qu’ils rencontrent, en soulignant les bénéfices potentiels de la protection sociale et en évaluant la situation actuelle de la protection sociale pour ce groupe vulnérable. Tirant les leçons de l’expérience de l’UNICEF dans différents pays concernés par les réfugiés et les déplacements internes tels que le Brésil, l’Éthiopie, la Slovaquie et la Türkiye, il formule également des recommandations afin de renforcer les systèmes inclusifs de protection sociale spécialement conçus pour répondre aux besoins humanitaires et de développement des enfants déplacés.
Bien qu’un nouvel élan en faveur des réformes semble se dessiner, nous estimons que celles visant à combler les lacunes dans la couverture légale de protection sociale ont toujours été entravées par la conception même du système migratoire, à savoir la courte durée supposée de la migration et le recours excessif aux dispositions offertes par les employeurs. Par ailleurs, l’économie politique de la région se traduit par un marché du travail segmenté, avec des droits à la protection sociale différents pour les travailleurs nationaux et les travailleurs migrants, ainsi qu’une représentation limitée des travailleurs migrants. En dépit des quelques nouveaux mécanismes mis en place, les systèmes judiciaires et de règlement des différends au travail échouent souvent à protéger les travailleurs et leurs familles lorsque les prestations ne sont pas versées. En pratique, d’autres obstacles bureaucratiques, financiers, linguistiques, documentaires et géographiques restreignent davantage l’accès des travailleurs migrants à la protection sociale. L’article se conclut par des implications politiques majeures, notamment des mesures visant à: élaborer des dispositions juridiques complètes conformes aux normes et principes internationaux, ainsi qu’aux engagements du Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies de ne laisser personne de côté et de garantir une protection sociale pour tous; éliminer les obstacles concrets, les déséquilibres de pouvoirs et les lacunes en matière de sensibilisation, de contrôle et d’application; et renforcer le dialogue et la collaboration entre tous les acteurs dont le CCG et les gouvernements des pays d’origine, les employeurs, les travailleurs et, plus largement, les parties prenantes défendant activement les droits des travailleurs migrants.
Cet article sur l’extension de la couverture de la protection sociale se concentre sur les réfugiés, tels que définis par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Notre approche de cette couverture est fondée sur les piliers de la santé publique et de la protection sociale, qui en constituent à la fois la raison d’être et la base législative. Les prestations de protection sociale visées sont un ensemble de services de santé complets dont l’accès est garanti sans conditions; il s’agit, par exemple, du versement de cotisations préalables ou d’une durée de séjour requise. Les réfugiés sont des personnes vulnérables qui fuient des zones de guerre ou font l’objet de persécutions et de menaces personnelles. En plus d’être affligés par la perte de membres de leur famille et d’amis, ils se retrouvent privés de leurs biens, de leurs moyens de subsistance, et de leurs repères sociaux et culturels. Certains d’entre eux ont subi des blessures avant d’être secourus et évacués, et requièrent des soins supplémentaires. Ils peuvent souffrir de maladies chroniques et avoir besoin de médicaments auxquels ils n’ont plus accès. D’autres peuvent être porteurs de maladies transmissibles, comme la tuberculose, et les enfants peuvent avoir été privés des vaccinations obligatoires planifiées. Les réfugiés sont vulnérables aux infections émergentes et résurgentes, comme l’a prouvé la pandémie de COVID-19. Si cet article met principalement en lumière la fourniture de soins de santé, il s’intéresse également aux déterminants sociaux de la santé comme l’accès à l’éducation, l’emploi assorti de conditions de travail décentes et l’existence d’un environnement sûr. Nous nous concentrons sur la couverture garantie par les autorités et les institutions nationales ainsi que par les amendements législatifs permettant aux non-citoyens d’en bénéficier. Par ailleurs, nous fournissons des exemples nationaux. L’expérience a montré que l’instauration d’une couverture était réalisable grâce à l’appui et aux conseils des organisations et associations internationales et locales avec, de surcroît, l’acceptation par les institutions de protection sociale existantes des avantages de l’extension de la couverture aux nouveaux membres. Cet article approuve le principe et l’engagement des objectifs de développement durable pour 2030 des Nations Unies de «ne laisser personne de côté».
Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, a pour mission de sauver des vies et de bâtir un avenir meilleur pour les millions de personnes déplacées de force et d’apatrides. Cette contribution met en lumière les responsabilités du HCR à l’égard des groupes de population déplacés, et décrit la nature des défis humanitaires et de développement humain auxquels la communauté internationale est confrontée. À cet égard, les objectifs d’extension de la couverture de protection sociale définis par le Programme de développement durable à l’horizon 2030 et le Partenariat mondial pour la protection sociale universelle, visant à ne laisser personne de côté, sont considérés comme essentiels.
Ce numéro spécial 2023 de l’International Social Security Review entend alimenter le débat central suscité par l’ambition internationale des objectifs de développement durable des Nations Unies de ne laisser personne de côté, et ce en promouvant l’extension de la couverture de la sécurité sociale. Il aborde plus spécifiquement les droits à la sécurité sociale de certains groupes de population ciblés prioritairement par le programme de travail actuel de l’Association internationale de la sécurité sociale, à savoir les personnes déplacées, dont les enfants représentent une large proportion, et les travailleurs migrants internationaux. Ce choix est implicitement motivé par la volonté de rassembler, d’analyser, d’enrichir et de diffuser les connaissances afin de bâtir un consensus plus large et, ainsi, permettre l’instauration effective d’une couverture de sécurité sociale pour tous.
Cet article dresse le bilan d'une grande enquête conduite en 2009 par l'Association internationale de la sécurité sociale (AISS), qui porte sur les incidences de la crise économique et financière sur les administrations de sécurité sociale. Il en ressort qu'une majorité d'administrations a été durement éprouvée par la baisse de la rentabilité des investissements des fonds de la sécurité sociale et par la chute des recettes provenant des cotisations. Dans le même temps, ces administrations doivent faire face à une augmentation des dépenses au titre des prestations. Or, en dépit de ce constat, il semblerait qu'elles aient réagi de manière souvent positive et novatrice à ces revers. Néanmoins, les difficultés persistent. A cet égard, le problème le plus préoccupant reste que la reprise économique risque d'être lente, que la crise sur le marché du travail peut perdurer avec, pour corollaire, des réserves financières qui s'épuisent et une marge de manœuvre budgétaire plus que restreinte.
La crise économique a au moins le mérite de rappeler que la protection sociale est à la fois un amortisseur social et un stabilisateur économique qui limite la gravité de la récession. Les prestations sociales sont d'ailleurs utilisées par les pays de l'Union européenne, ainsi que par l'Union elle‐même dans le cadre de son plan de relance, pour venir en aide aux personnes victimes de la crise, stimuler la consommation des ménages et, par ce biais, soutenir l'activité des entreprises et favoriser l'emploi. Mais la crise pourrait être aussi l'occasion pour l'Union européenne de renforcer ses systèmes de protection sociale en s'inspirant des grands principes du droit social international, en affirmant la légitimité de hauts niveaux de protection sociale, en favorisant la convergence vers le haut des systèmes de protection sociale des Etats membres, et en augmentant son budget.
Pour contrer les conséquences sociales négatives de la crise actuelle, les Etats doivent prendre des mesures destinées à offrir une aide au revenu et de nouvelles perspectives d'emploi aux travailleurs victimes de la crise et à leur famille. Cet article dresse un inventaire des mesures adoptées dans différents pays face à la crise dans le domaine de la protection contre le chômage, qui constitue la branche de la sécurité sociale la plus directement touchée par le ralentissement. Il décrit également les dilemmes auxquels sont confrontés tous les régimes de sécurité sociale en période de crise économique, les recettes de cotisations et les recettes fiscales affectées au financement des programmes diminuant, tandis que les dépenses de prestations augmentent. Une attention particulière est accordée aux problèmes relatifs à la retraite. L'article se termine par un examen de l'initiative lancée par les Nations Unies pour mettre en place un «socle de protection sociale» mondial. Son but est de permettre à la majorité de la population mondiale actuellement dépourvue de couverture et exposée à tous les risques économiques et sociaux de bénéficier, au minimum, d'une protection sociale de base.
Alors que la crise financière mondiale a eu un impact considérable sur les taux de pauvreté des pays en développement, les mesures de protection sociale prises, sous forme de mesures d'aide sociale, pour y faire face sont, jusqu'à présent, restées limitées. La raison est à rechercher dans l'insuffisance des systèmes et dans la faiblesse de la couverture avant la crise. Avec la diminution de leurs ressources, les pays en développement ont eu des difficultés à respecter les engagements pris avant la crise en matière de protection sociale. Dans ce contexte, il existe peu de possibilités d'extension de la couverture à ceux qui se sont appauvris davantage du fait de la crise et aux «nouveaux pauvres». Bien que beaucoup de pays aient mené une politique budgétaire expansionniste, les stratégies mises en œuvre face à la crise ont essentiellement porté sur la préservation et la stimulation de la croissance. La priorité n'a pas été accordée à la fourniture de protection sociale pour aider directement les pauvres. Lorsque des mesures de protection sociale ont été adoptées, elles ont, dans de nombreux cas, pris la forme de mesures ad hoc, souvent rétrogrades, comme l'octroi de subventions alimentaires ou énergétiques, plutôt que de démarches plus systémiques, destinées à lutter contre la pauvreté. Toutefois, peut‐être est‐il permis d'être optimiste, la crise ayant suscité plusieurs initiatives pour favoriser la coordination des donateurs et la cohérence de la programmation, ce quipourrait autoriser, à l'avenir, une amélioration de celle‐ci dans le secteur de la protection sociale.
Les fonds des régimes de sécurité sociale et les fonds de pension ont été touchés de plein fouet par la récente crise financière qui fut d'une brutalité sans précédent. Ils ont subi des moins‐values latentes considérables et leurs mécanismes de gouvernance ont été remis en cause au risque de compromettre leur stabilité financière et de remettre en question leur capacitéà fournir des prestations décentes. L'année 2009 s'est achevée par une reprise des marchés financiers, mais également par des réaménagements des portefeuilles et par une révision des approches traditionnelles de la gestion des risques. Les gouvernements ont réagi à la crise en lançant des plans de relance qui pourraient, à moyen terme, mettre en péril leur situation budgétaire. Les déséquilibres budgétaires pourraient en effet donner lieu à un arbitrage entre la stabilité budgétaire et la réduction des dépenses sociales. Le présent article analyse les effets de la crise sur les fonds des régimes de sécurité sociale et les fonds de pension et aborde l'ensemble des questions susmentionnées.