La collaboration au service de l’innovation en sécurité sociale: expériences des membres de l’AISS

La collaboration au service de l’innovation en sécurité sociale: expériences des membres de l’AISS

La capacité à innover est un puissant levier d’amélioration de la sécurité sociale. L’édification d’institutions favorables à l’innovation et l’intégration de l’innovation dans les processus organisationnels supposent une vision stratégique, un leadership et une détermination à promouvoir la créativité et la collaboration dans toutes les divisions et équipes de l’institution.

Le Forum mondial de la sécurité sociale (WSSF) organisé à Marrakech, Maroc, du 24 au 28 octobre 2022 a permis de découvrir de remarquables exemples d’innovation dans le domaine de la sécurité sociale. Une séance spéciale intitulée Collaborer pour favoriser l’innovation en matière de sécurité sociale a mis en évidence les éléments de base indispensables à une forte capacité d’innovation au sein des institutions de sécurité sociale et a présenté la plateforme d’innovation collaborative de l’AISS. À travers ses activités, l’Association internationale de la sécurité sociale (AISS) favorise l’innovation en sécurité sociale fondée sur des approches collaboratives au niveau international. Elle a vocation à aider ses institutions membres à concevoir des projets innovants et à se doter d’une plus grande capacité d’innovation.

Cet article analyse les expériences que les trois institutions suivantes ont présentées durant le WSSF, à Marrakech: Emploi et développement social Canada (EDSC), l’Institution d’assurance sociale (Kansaneläkelaitos – Kela), Finlande, et le Fonds central de prévoyance (Central Provident Fund – CPF), qui dépend du ministère de la Main-d’œuvre de Singapour. Toutes ces innovations impliquaient une collaboration interne et interinstitutionnelle. À noter qu’EDSC a remporté le Prix AISS des bonnes pratiques en 2020 pour les efforts déployés dans le domaine de l’innovation et de la transformation institutionnelle.

Approches du Canada, de la Finlande et de Singapour en matière d’innovation

Canada: travail en équipe agile, déploiement de solutions à grande échelle et utilisation du design thinking pour concevoir des systèmes

EDSC offre des services de développement social, verse des pensions et des prestations d’assurance emploi et propose des programmes de formation à plus de 38 millions d’habitants du Canada. L’institution emploie quelque 45 000 personnes réparties dans dix provinces couvrant cinq fuseaux horaires. Pour affronter la COVID-19, elle a fait appel à des solutions reposant sur de nouvelles formes d’organisation interne afin de renforcer sa capacité d’innovation.

  • Des méthodes agiles pour concevoir les prestations. La subvention de formation offre une bonne illustration du recours à une méthode agile pour la création de nouvelles prestations, puisqu’elle a été créée en quelques semaines au lieu de quelques mois. Pour parvenir à ce résultat, EDSC a mobilisé un écosystème complexe de partenaires. Alors que, habituellement, la décision d’introduire une prestation était prise par des experts qui élaboraient un argumentaire sans consulter leurs collègues, dans cet exemple, elle a été prise à l’issue d’un processus multidisciplinaire et collectif reposant sur une méthode semblable à celle employée pour développer des logiciels. Chaque semaine, les dirigeants d’EDSC rencontraient des cadres et experts de différentes divisions de telle façon que chacun cerne bien les objectifs de politique publique visés, le public ciblé, le fonctionnement et les aspects en lien avec l’intégrité des services. En huit semaines, une proposition a été élaborée à l’intention du ministère. L’objectif était que la prestation soit mieux conçue et plus adaptée aux capacités d’EDSC.
  • Renforcer les capacités d’innovation du personnel. Selon EDSC, le déploiement de l’innovation est un enjeu majeur pour impulser une transformation des services. Pour déployer ses innovations à grande échelle, l’institution a utilisé ses propres experts, qu’elle a libérés de leurs tâches quotidiennes et autres obligations, et a ainsi mis en œuvre la bonne pratique intitulée La transformation des services: le design thinking et le Centre d’accélération, récompensée par le Prix AISS des bonnes pratiques. Elle a en outre permis au personnel de se former à de nouvelles compétences et l’a doté de nouveaux outils tels que la gestion du changement et de l’expérience client.
  • Il est établi que le design thinking est une méthode indispensable pour transcender les barrières en matière de fourniture de services. Ainsi, le redémarrage des vols internationaux, à l’été 2022, s’est traduit par un afflux de demandes de passeports qui a entraîné des retards dans la délivrance. C’est à EDSC qu’il revient de délivrer les passeports au nom d’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada par l’intermédiaire de Service Canada. L’institution a examiné les processus opérationnels et les goulets d’étranglement au cours d’une réunion de cinq heures avec des agents chargés de questions de transport. Elle a découvert que la suppression d’une fonction administrative peu qualifiée avait pour conséquence de donner du travail supplémentaire aux cadres et allongeait la durée de traitement des demandes de passeports. Pour éliminer le retard qui s’était accumulé, elle a libéré les cadres de ces tâches et leur a ainsi permis de se recentrer sur des priorités de plus haut niveau.

Finlande: information et communication en ligne centrée sur l’usager

Kela fournit des services d’assurance sociale à tous les résidents de la Finlande en s’appuyant sur les connaissances, le soutien et la collaboration. Le travail collaboratif se trouve donc au centre de sa mission et des moyens qu’elle déploie pour fournir ses services. Elle fait appel à des écosystèmes qui regroupent des acteurs très divers pour mettre au point des solutions centrées sur l’usager. La création des services d’information et de communication centrés sur l’usager constitue un cas d’école. Les services aux usagers sont fournis en ligne, par téléphone et en présentiel dans différents lieux.

Le site Web Kela.fi fait partie des sites finlandais les plus consultés, avec plus de 56 millions de consultations en 2021. Il compte plus de 8 000 pages, et plus de 80 pour cent des demandes de prestations sont actuellement déposées en ligne. Il fournit aux usagers, aux organisations d’employeurs partenaires et autres acteurs des informations sur la législation et les procédures.

Kela a lancé un projet dans le but de simplifier ces informations, de même que les formulaires et les services. Auparavant, les informations étaient jugées compliquées et difficiles à comprendre. Les changements suivants ont été introduits:

  • Une langue adaptée aux utilisateurs, simple et courante. Quelque 5 000 pages Web ont été analysées. Avant l’introduction des changements, les prises de contact des usagers étaient souvent motivées par la non-compréhension de certains mots. Pénibles pour les usagers, ces demandes représentaient en outre une charge de travail considérable pour le personnel.
  • Des équipes multidisciplinaires. Au lieu de s’en remettre exclusivement à la division de la communication ou aux professionnels de l’informatique et d’Internet, l’institution a associé plusieurs de ses divisions au projet, qui a ainsi bénéficié de compétences variées – correcteurs linguistiques, conseillers juridiques, concepteurs de services centrés sur l’utilisateur (pour les modifications de l’apparence de l’interface) et spécialistes des technologies de l’information.
  • Une analyse du profil des utilisateurs. Pour mieux comprendre les besoins et attentes des usagers, Kela a étudié différents profils d’utilisateurs dans le but de comprendre comment mieux adapter l’information et les services à différents publics.

Ce projet de simplification est l’une des plus ambitieuses entreprises de ce type qui ait jamais été menée dans les services publics finlandais.

Singapour: architecture organisationnelle et pratiques pour l’innovation

Le CPF a pour finalité de garantir des revenus aux retraités à travers le versement de prestations jusqu’au décès, le financement des soins de santé et le financement du logement. Il innove en s’appuyant sur la coopération, en interne et avec des partenaires extérieurs. Cette collaboration repose sur les principes et pratiques décrits ci-après.

  • Délégation au personnel du pouvoir de mise en œuvre. Au lieu de donner des ordres et de dire au personnel ce qu’il doit faire, la direction formule les objectifs que l’institution doit viser et précise les raisons pour lesquelles elle veut les atteindre. Ce sont ensuite les salariés qui recherchent comment les atteindre.
  • Une approche de la résolution de problèmes reposant sur un partenariat de type «solutions sans frontières». Le protocole de gestion des demandes rejetées (Rejected Appeals Management Protocol – RAMP) illustre l’utilisation d’un réseau de partenaires pour résoudre des problèmes rencontrés par les usagers (Wong, 2020). L’épargne-retraite obligatoire constitue un engagement dans la durée. Chaque mois, le CPF reçoit 4 000 demandes de personnes souhaitant retirer de l’argent de leur compte pour financer des besoins immédiats, par exemple pour payer des soins médicaux ou les études de leurs enfants ou encore pour rembourser une dette. Il tente de faire preuve de compréhension dans le traitement de ces demandes tout en respectant les règles applicables en matière de retrait mais, dans 25 pour cent des cas, les raisons avancées par les demandeurs pour retirer leur épargne ne correspondent pas à un motif prévu par la loi. Le CPF a tissé un réseau de plus de 40 organisations vers lesquelles il oriente ses membres pour qu’ils bénéficient d’un soutien financier et psychologique. 
  • Remise en cause des pratiques traditionnelles à travers une expérimentation audacieuse. La conception d’un système permettant aux personnes non titulaires d’un compte bancaire de retirer de l’argent dans des distributeurs automatiques est un exemple d’expérimentation audacieuse. Plus de 40 000&nsbp;personnes recevaient encore leurs paiements par chèque, ce qui était compliqué sur le plan opérationnel et n’était pas tenable. Grâce à une collaboration avec la banque Oversea-Chinese Banking Corporation (OCBC), les Singapouriens peuvent désormais être payés par l’intermédiaire du système GovCash, qui leur permet de retirer de l’argent dans des distributeurs en libre-service. La mise en place de ce système a nécessité des innovations en matière de dispositifs de reconnaissance faciale. Le système devrait être utilisé pour le paiement d’autres prestations publiques.

Pour innover à grande échelle, il faut que l’environnement s’y prête, compte tenu des contraintes institutionnelles qui existent. Les outils suivants ont été mis en place pour permettre une innovation reposant sur la collaboration tout en accordant l’importance requise aux processus, aux lieux et aux personnes.

  • Le Fonds d’expérimentation du CPF élimine les risques inhérents aux processus d’innovation. Il encourage le personnel à expérimenter sans avoir peur qu’un échec se répercute sur le budget courant de leur division. L’automatisation du traitement des demandes d’indemnisation au moyen de l’apprentissage automatique est un exemple d’expérimentation qui a bénéficié du soutien de ce fonds.
  • Laboratoires d’automatisation et de jeu internes au CPF. Le laboratoire d’automatisation aide le personnel à éliminer, améliorer ou automatiser les tâches manuelles qui lui incombent (Nolan, 2021). Le CPF a également transformé un espace physique en un lieu de partage de connaissances appelé le laboratoire de jeu. Ce laboratoire est un lieu d’expérimentation ouverte. Il organise des démonstrations d’entreprises innovantes du secteur privée et met sur pied des hackathons.
  • Engagement des dirigeants en faveur de l’innovation. Dans le cas du CPF, l’innovation n’est possible que si les dirigeants montrent la voie et s’engagent dans la durée. Les dirigeants bénéficient également du soutien de l’institution pour mettre en place des formations sur le terrain.
Tableau 1. Présentation synthétique des innovations collaboratives
Institution Description Impact
EDSC, Canada Innovation au niveau des politiques publiques (subvention de formation canadienne) grâce à des méthodes de travail agiles. Soumise au conseil d’administration d’EDSC et approuvée en moins de huit semaines.
Déploiement de l’innovation à grande échelle par le renforcement des capacités d’innovation du personnel en recrutant des agents, en les formant et en leur permettant d’acquérir de nouvelles compétences. Mise en œuvre de démarches d’innovation plus ciblées et plus efficaces dans l’ensemble de l’institution.
Application du design thinking à la résolution de problèmes. Amélioration de l’efficience et de la rapidité de la délivrance des passeports.
Kela, Finlande Un site facile à utiliser, faisant appel à une langue simple et courante. Analyse de 5 000 pages du site Web sur 8 000. Réduction du temps passé à répondre aux questions posées par les usagers et des désagréments subis par les usagers.
Recours à des équipes multidisciplinaires plutôt qu’aux seuls experts Web pour la conception de l’interface, la rédaction, le respect des règles juridiques et le codage. Implication de plusieurs divisions de l’institution et mobilisation de diverses compétences – correcteurs linguistiques, conseillers juridiques, concepteurs de services centrés sur l’utilisateur et spécialistes des technologies de l’information.
Établissement de profils d’usagers pour mieux comprendre les besoins et attentes des usagers. Langue, interface, contenu et organisation des informations en ligne plus adaptés.
CPF, Singapour Délégation au personnel du pouvoir de mise en œuvre. Le personnel est encouragé à prendre des initiatives et à assumer la prise de risque.
Une approche de la résolution de problèmes reposant sur un partenariat de type «solutions sans frontières». Le protocole de gestion des demandes rejetées (Rejected Appeals Management Protocol – RAMP) repose sur l’utilisation d’un réseau de partenaires pour résoudre des problèmes rencontrés par les usagers. Pour aider 17 000 personnes qui ont besoin de retirer de l’argent pour financer des besoins urgents, le CPF utilise un réseau de plus de 40 organisations partenaires capables d’apporter un soutien financier et psychologique aux usagers.
Remise en cause des pratiques traditionnelles à travers une expérimentation audacieuse. La conception d’un système permettant aux personnes non titulaires d’un compte bancaire de retirer de l’argent dans des distributeurs automatiques en est un exemple. Plus de 40 000 personnes peuvent recevoir leurs paiements via le système GovCash et retirer de l’argent directement dans un distributeur automatique.
Le Fonds d’expérimentation élimine le risque inhérent à l’innovation. Il encourage les membres du personnel à expérimenter sans avoir peur qu’un échec se répercute sur le budget courant de leur division.
Laboratoires d’automatisation et de jeu internes au CPF. Les laboratoires permettent des innovations pratiques.
Engagement durable des dirigeants vis-à-vis de l’innovation. Les dirigeants mettent en place les éléments et outils nécessaires à l’innovation. À travers leur engagement soutenu et éclairé, ils contribuent au changement de culture institutionnelle.

Principaux facteurs de réussite de l’innovation collaborative

Les expériences du Canada, de la Finlande et de Singapour montrent que la collaboration est au cœur de nouvelles formes d’innovation. Les innovations présentées dans cet article peuvent être organisées autour de cinq grands thèmes en lien avec le renforcement des capacités d’innovation collaborative des institutions de sécurité sociale:

  • méthodes de travail en équipe agiles, capacités du personnel (attitudes, compétences et outils) et techniques de résolution de problèmes;
  • place centrale de l’usager, profilage des usagers et travail multidisciplinaire;
  • architecture et pratiques organisationnelles (délégation de pouvoir et possibilité d’expérimentation audacieuse, établissement de partenariats);
  • composantes du système d’innovation – processus, lieux et individus agissant comme des leviers (fonds d’expérimentation, lieux et moments permettant de faire des démonstrations et d’expérimenter l’innovation);
  • implication constante des dirigeants, par l’exemple et à travers l’apprentissage continu.

Possibilités de collaboration internationale

À travers sa plateforme d’innovation collaborative, l’AISS entend instaurer un environnement qui permette à ses membres de s’engager dans une démarche de collaboration internationale pour innover. L’objectif est à la fois de favoriser le renforcement de la capacité à innover et de mettre au point des solutions pratiques. Le premier volet englobe une évolution des ressources humaines pour les aider à innover et le deuxième peut avoir trait à l’utilisation de technologies numériques, par exemple pour l’échange de données. Le développement de cadres à l’appui de l’innovation et la nécessité d’améliorer l’architecture de gouvernance pour qu’il y ait à la fois coordination organisationnelle et gestion agile (Ross, Beath et Mocker, 2019) ont également leur place dans la plateforme. Enfin, plusieurs exemples d’innovation montrent que le leadership est indispensable et doit être développé et renforcé. Les institutions membres pourront en outre définir d’autres thèmes. Lors du WSSF, à Marrakech, les membres de l’AISS ont émis des suggestions concernant les activités possibles pour la plateforme d’innovation collaborative.

Ainsi, selon EDSC, la plateforme pourrait aider les membres à mettre en œuvre et à accélérer l’expérimentation en leur permettant de recevoir des conseils de plusieurs sources. La plateforme peut donc aider les membres à:

Figure

Source: L’auteur, d’après l’intervention d’EDSC lors du WSSF, Maroc, octobre 2022.

De même, bien qu’elle soit aux avant-postes de l’innovation et de la numérisation, Kela, en Finlande, a souligné combien il est important de tirer les leçons des expériences étrangères et de les expérimenter localement. Le CPF, à Singapour, a aussi bénéficié d’une collaboration internationale tout au long de son processus de transformation. Apprendre des technologies et processus émergents en place et des autres solutions envisageables accélère l’apprentissage, les institutions tirant parti des succès et des échecs. Le CPF insiste toutefois sur la nécessité de prendre en considération les différences culturelles et la diversité des contextes lorsque l’on envisage de transférer des politiques, technologies et processus. Il est nécessaire d’adapter les solutions aux différents pays. De plus, l’innovation a lieu dans le cadre d’écosystèmes locaux, ce qui signifie qu’il ne faut pas voir les institutions indépendamment de leur environnement: il est au contraire nécessaire de tenir compte des contextes dans lesquels elles remplissent leur mission et des liens et partenariats qu’elles établissent avec d’autres acteurs de l’innovation.

Conclusion

Contrairement aux activités internes de recherche et développement, l’innovation implique la mobilisation de processus reposant sur une collaboration au sein de l’institution et avec des partenaires extérieurs sous la conduite d’équipes multidisciplinaires. Certaines institutions de sécurité sociale sont déjà dotées de remarquables capacités d’innovation collaborative. Les compétences personnelles des dirigeants, de l’encadrement intermédiaire et du personnel jouent un rôle central. Autre levier: la capacité à apprendre et à expérimenter de manière collective. L’innovation collaborative exige donc un changement d’approche par rapport aux méthodes traditionnelles de gestion et de mise en œuvre des politiques de sécurité sociale et un changement profond de profil des dirigeants, ainsi qu’une transformation des méthodes de travail, des mentalités et des compétences. La collaboration internationale peut contribuer au renforcement des capacités d’innovation collaborative. La plateforme d’innovation collaborative de l’AISS permettra aux institutions membres de disposer d’un espace pour collaborer de manière pratique.

Références

Nolan, S. 2021. «How Singapore simplified pensions and financial planning», dans GovInsider, 30 novembre.

Ross, J. W.; Beath, C. M.; Mocker, M. 2019. Designed for digital: How to architect your business for sustained success. Cambridge, MA, MIT Press.

Wong, S. M. 2020. «If there's any pain, we feel it first», dans Challenge, 8 décembre.